Bienvenue à Catherine, la nouvelle détachée pédagogique

Bonjour Catherine, en deux mots, qui es-tu ?

Je m’appelle Catherine Beauthier. J’ai travaillé 15 ans en tant qu’institutrice primaire dans une école à encadrement différencié au sein de la commune de Saint-Gilles où j’ai été confrontée à des populations en situation de précarité.

Peux-tu nous expliquer ce qu’est une détachée pédagogique ?

Une détachée pédagogique, c’est un prof qui continue à être rémunéré par la Fédération Wallonie-Bruxelles et qui travaille durant 3 ans pour une Organisation de Jeunesse. L’objectif est d’y acquérir une nouvelle expérience qui puisse ensuite enrichir ses pratiques lors de son retour dans le monde l’enseignement.

Quel a été ton chemin professionnel avant de rejoindre ATD Quart Monde ?

J’ai été confrontée fréquemment aux inégalités scolaires et à la précarité grandissante des familles avec lesquelles je collaborais. Le public de mon école venait principalement du quartier et de milieux socioculturels défavorisés avec une très grande diversité culturelle. Durant cette période, j’ai tissé des liens humains très forts avec ces enfants, ce qui m’a énormément marquée. Au quotidien, en tant qu’institutrice, je n’avais pas toujours le temps de prendre du recul par rapport à mes pratiques et à ce que les enfants vivaient. Je me suis tournée vers ATD pour prendre du recul par rapport à mes 15 années dans l’enseignement d’une part et mettre mon expérience au service du projet du Mouvement d’autre part.

En quoi penses-tu que ton expérience à ATD Quart Monde pourra enrichir ta pratique lorsque tu retourneras dans l’enseignement ?

Après deux semaines à peine dans ce travail, j’ai déjà pu lire et avoir des échanges très intéressants qui m’ont permis de mieux comprendre des situations que j’ai rencontrées lorsque j’étais institutrice. Je pense que c’est cette nouvelle compréhension que je pourrai apporter à mon équipe. Je pourrai aussi susciter des réflexions. Être attentive au lien parents-école, à la violence que peut être l’institution scolaire pour les plus fragiles, ce sont des sujets que je veux mettre en avant sur la table de ma salle des profs. Je serai attentive à ce qu’il y ait une attention particulière aux familles et aux enfants précaires au sein de l’équipe, dans nos conversations, dans nos pratiques, dans les liens parents-école.

Tu parles beaucoup d’une prise de recul nécessaire. Qu’entends-tu par « prise de recul » ?

En tant qu’institutrice, il est parfois difficile de lever la tête du guidon, nous sommes constamment sollicitées et confrontées à un flux tendu d’informations. Face à une boîte à tartine vide, nous n’avons pas beaucoup de temps pour la réflexion. Nous devons trouver des solutions dans l’immédiat. Il en va de même quand un enfant est absent parce que sa maman doit aller au CPAS, par exemple. Il y a une banalisation de la précarité, d’une certaine façon. Prendre du recul, c’est débanaliser, chercher à comprendre.

Quelles sont les premières impressions que tu as ressenties après deux semaines à la Maison Quart Monde ?

On donne du temps pour faire les choses, ce qui contraste avec la profession d’institutrice. La bienveillance et l’accueil de l’équipe m’ont touchée. Dans tout ce que l’on fait à ATD, j’ai l’impression qu’on cherche à tirer de la connaissance dans l’expérience vécue de la précarité, et c’est quelque chose qui fait sens pour moi.

Quelle patte souhaites-tu imprimer à tes années dans le Mouvement ?

Je souhaite mettre mon expérience de terrain au service d’ATD car je suis convaincue que réduire les inégalités scolaires est un levier essentiel pour l’émancipation des futur·e·s adultes. Je veux sensibiliser les futur·e·s professionnel·le·s de l’école, car durant ma propre formation, on ne m’a jamais parlé de précarité. On nous parle beaucoup de pédagogie mais peu des gens à qui on va enseigner. C’est l’une des raisons pour lesquelles la sensibilisation m’enthousiasme.

Propos recueillis par Gabriel Meeûs